mercredi, janvier 31, 2007

Le Viaduc du "Tue-vaques"...

Ce midi, 'tite balade au viaduc de Fermanville.

ça faisait au moins vingt ans que je n'y était pas retourné. La dernière fois, mon père me tenait par la main, et j'ai eu l'impression d'avoir marché pendant trois heures pour y arriver.

Record battu aujourd'hui : j'ai mis à peine dix minutes (et sans me presser...). Sans doute la croissance osseuse de mes jambes ou les mouvements tectoniques de la faille de Cherbourg-Barfleur qui ont raccourci la route... Bref.

Voila donc ce sympathique viaduc !

Et là, un zoli panneau à touriste m'apprend plein de choses :

Aux vues de l'important trafic maraîcher transistant par Cherbourg à bord carrioles à chevaux ainsi que de la desserte des différents forts militaires répartis sur le pourtour du Val de Saire jusqu'à St Vaast la Hougue, la ligne de chemin de fer Cherbourg - Barfleur est déclarée d'interêt publique en 1904.

Comme de nos jours, les politiques de l'époque ne se sont pas pressés : les premières réflexions au sujet de cette ligne datent de 1860 et l'enquête est lancée en 1880 !

Reste que la ligne doit traverser la vallée des moulins de Fermanville....

Il est décidé qu'elle serait enjambée par un viaduc. Démarré en 1908,le viaduc est long de 242 m est porté par vingt arches de granit de 32 m de haut et de 5 m de large, et représente 7000m3 de granit. La construction des 32 kms de la ligne à coups de pelles, de pioches et parfois d'explosifs pris 3 ans. Et à cette époque, personne ne s'affolle de ne pas voir de rambardes au viaduc (faut croire que les gens étaient moins suicidaires que maintenant ;-) ).

Le 9 juillet 1911, tracté par une locomotive Weidknecht 030T le convoi composé de six voitures mixtes - 1ère et 2ème classes - emmenant plus de 300 voyageurs s'ébranle en gare de Cherbourg pour l'inauguration de la ligne. Dès le lendemain, à la hauteur de Rauville, le train subit son premier déraillement. Et ce ne sera pas le dernier...

L'indispensable chemin de fer acheminait aussi les sacs postaux, les journaux du matin et accessoirement les cortèges funéraires et leurs cerceuils.

En 1914, le ticket coûte 1 francs 15 en 1ère classe et 85 centimes en seconde.

Pendant la seconde guerre mondiale, réquisitionné à de nombreuses reprises par l'armée allemande, le petit train transportera le sable des dunes vers les chantiers de construction du mur de l'atlantique ainsi que de nombreux matériels militaires. Lors du débarquement, la ligne fut sabotée à plusieurs endroits par l'armée allemande avant la retraite. Six piles du viaduc de Fermanville s'effondrèrent sous l'effet de l'explosif. La marine Alliée aide aussi un peu en pilonnant un peu la région (z'étaient pas trés précis les artilleurs... Les vagues locales n'ont jamais réussi aux anglais de toute façon...).

Indispensable aux troupes alliées, la petite ligne hautement stratégique fut remise rapidement en état. En 1945, sommairement réparé, il est réutilisable en 1947.

L'usure de la ligne et du matériel roulant, imposa l'arrêt définitif le 2 octobre 1950. Remplacé par l'actuelle route de la côte jusqu'à Fermanville, le tue-vaques n'a plus d'utilité. Triste fin.

On voit encore des bouts de rails de la ligne, quand on sait où chercher ;-)

Maintenant, le viaduc est aménagé pour accueillir des touristes. C'est mal foutu, c'est moche et en plus ça ôte tout le charme de l'endroit...

Impossible de se pencher au bord, y'a une cloture à un bon mètre du bord ! le passage est ridiculement sécurisé...

Mais bon, tout est comme ça de nos jours. Faut absolument nous protéger de nos pulsions suicidaires et des terribles dangers de la vilaine-vilaine-vilaine nature qui nous veut du mal...

Tssss...ça me gave... :-(

Reste que le coin est toujours aussi joli. Surtout un jour comme aujourd'hui : Y'a pas un chat et on n'entend que le bruits de l'eau qui cascade (ben oui, c'est pas la "vallée des moulins" pour rien...faut suivre un peu, hein...) et les animaux qui s'enfuient dans les bois.

C'est reposant et je suis vraiment content d'être revenu faire un tour par içi. Moi qui suis plutôt mer que balade en forêt, j'apprécie vraiment ce coin tranquille et pas trop défiguré par les sirènes du tourisme "aménagé".


A propos, au sujet du nom du train , pourquoi "Tue-Vaques" ?
Ben, les Vaques (vache, en patois du coin) adorant tout particulièrement les 'tit trains, un bon nombres d'entre elles ont eu une fin, disons, prématurée en broutant nonchalament sur les rails... donc "Tue-Vaques".

Z'étaient forts les anciens pour les expressions. ;-)

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